A toi le futur voyant
qui
des siècles infâmes aura fait le deuil
que
fascinent encore le vent fier, et les feuilles,
qui
souffle des silences aux nuages indolents
Toi
dont la table ne me sera jamais familière
Sur
ma voix perdue, ouvre des yeux vivants
Toi
pour qui je ne suis qu'un souvenir errant
Au
milieu des esprits d'une autre ère
Je
suis né d'un bruit féroce, et comme toi
je
vois des temples sous chaque silence
des
merveilles que les enfants précoces,
délaissent
pour des jeux d'importance
Mon
ami de demain, mon siècle est trop étroit !
Il
me fait courber la tête, et pencher, maladroit !
Chaque
homme a son couloir dès le berceau
Et
loue la porte qui le mènera jusqu'au tombeau
Vois-tu
dans tes livres, l'horreur ordinaire ?
Privé
d'un ailleurs, d'un après, d'un avant
Mon
siècle a le dégoût des mers
des
espaces infinis, et des heures sans présent
La
vie s'est couchée et l'homme avec elle
s'épuise
en vain dans sa chair secrète
Il
parle en son nom et ordonne au ciel
de
chasser les anges, et les âmes des poètes
Cela
me semble doux, en un pareil moment,
que
le fleuve s'écoule et qu'il emporte mes tourments,
avec
eux le ciel ingrat, les étoiles navrantes
Qu'ils
dorment, que l'ether patiente
qu'un
jour débarassé du poids de l'existence
un
frère d'un autre temps
offre
le récit de l'espérance
a
mon esprit riant !