Qui êtes-vous ?
Cette question me hânte. Qui êtes-vous et pourquoi ne répondez-vous pas ? Un tableau, un regard immuable mais trahissant la mobilité de ses pigments, petit à petit. La persistance avec laquelle on vous observe délivre le plus grand de vos secrets, l'ouvrage reste à achever, ici et là, les détails d'un échaffaudage malhabile mais complexe se laissent voir par la sensibilité. Dans un monde complet, le vide qui borde votre coeur apparaît à leurs yeux comme un contenant qu'il faut songer à rendre fonctionnel. Pourtant, vous perdriez votre singularité.
Cela ne m'effraye pas, au contraire la déréliction de votre âme m'absorbe tout entier, je ne puis me trouver réconforté autrement que par le retrait et la distance au monde visible, rien ne m'ennivre davantage que le chant fantasmagorique de ces êtres à la substance voilée. Aussi je voudrais tellement, sinon comprendre, peut-être sentir votre existence et mettre sur sa saveur, un visage. Je crains hélas que vous ne soyez dans l'impossibilité de me répondre, en partie parce que le temps n'est pas responsable de la contingence de notre union et qu'il est difficile de reconnaître d'en avoir la paternité commune, de même que je soupçonne votre âme d'être un tourbillon incontrôlable, qui veut, aime et s'abstient sans savoir ce qu'elle est